- Le Grand Pinier 3117m et le Tuba 3008m en circuit par les Cols des Terres Blanches et de Freissinières

Publié le 18 juillet 2025 à 23:26

Réalisée le 15-17 juillet 2025.

 

Des fonds de vallées de basse altitude jusqu'aux sommets à plus de 4000m, le Massif des Ecrins est d'une diversité exceptionnelle avec une représentation de la totalité de l'étagement alpin. Mais d'une longueur d'une trentaine de kilomètres entre son point Nord et son point Sud, on distingue également une diversité de paysages entre la partie septentrionale et méridionale du Massif des Ecrins. En effet, alors qu'au Nord et au centre les vallées se terminent dans un environnement fait de verticalité et de glace caractéristiques des massifs cristallins, l'extrême Sud se compose de montagnes bien moins abruptes et bien moins hautes qui peinent à dépasser les 3000m d'altitude.

Une autre distinction tient à la praticabilité de ces deux zones du massif. Si le Nord forme une multitude de culs-de-sac pour les randonneurs voulant accéder aux cimes, le Sud est constitué d'un système de crêtes et de cols plus ou moins débonnaires permettant de basculer plus facilement d'une vallée à une autre, d'un versant à un autre et même parfois de sortir des sentiers battus. On change donc radicalement de paysages entre le Nord et le Sud du massif avec une partie méridionale qui ressemble davantage aux massifs limitrophes que sont le Queyras, l'Escreins ou le Parpaillon. On traverse ainsi des montagnes relativement sèches, dont la totalité des glaciers de haute montagne ont disparu, composées de vastes pierriers et alpages parfois garnis de quelques-uns de leurs vestiges, lacs et torrents notamment.

Cette zone Sud du Massif des Ecrins, que l'on délimiterait entre le Col de Freissinières au Nord jusqu'aux rives du Lac de Serre-Ponçon, bénéficie d'une relative notoriété. Moins connue que les vallées du Nord du Massif des Ecrins et plus éloignées des grandes agglomérations, Grenobloise notamment, elle a su garder un caractère sauvage accentué qui plus est par les vastes espaces praticables qui la composent. De même, le Gr54 effectuant le Tour des Ecrins et de l'Oisans ne s'immisce aucunement dans cette partie du massif puisqu'il ne descendra pas plus au Sud que le Pas de la Cavale. Le caractère sauvage de ces lieux est donc amplifié par une densité de sentier peu importante. Seuls les principaux cols et fonds de vallées sont pourvus de chemins balisés contrairement à de nombreux sommets, à des alpages plus excentrés et même à certains lacs d'altitude.

L'immersion dans cette zone Sud des Ecrins, à l'assaut du Grand Pinier, constituera un mixte entre des sentiers balisés et des cheminements à vue. On aura comme fil directeur le tour du Grand Pinier évoluant entre les versants Ouest et Est de la montagne, entre les Vallées d'Orcières et de Freissinières. On agrémentera ce tour de portions hors sentiers et de sommets pour élargir les panoramas et maximiser l'expérience sauvage dans le Sud du Parc National des Ecrins.

Le Grand Pinier 3117m, aussi appelé Pic Brun, est l'un des quelques géants du coin qui surpassent la barre symbolique des 3000m d'altitude. Sur cette extrémité Sud, il n'est seulement dépassé que par la Tête de Vautisse 3156m mais est entouré par de nombreux sommets satellites qui flirtent voire dépassent les 3000m. Deux points de départ sont possibles pour effectuer le Tour du Grand Pinier et son ascension : du côté de la Vallée de Freissinières il faudra remonter jusqu'au Parking du Pont des Oules, et du côté d'Orcières, il faudra atteindre le dernier hameau de la vallée, le petit village de Prapic.

On préfèrera un départ depuis Prapic, puisqu'étant en autonomie totale, cela nous évitera de redescendre trop bas durant ce circuit. Un départ depuis la Vallée de Freissinières obligerait de fait de devoir chuter sur Prapic à un moment donné. Alors que si on ne démarre pas du Pont des Oules, on peut facilement contourner par le haut les hameaux de Freissinières, et notamment Dormillouse.

 

Jour 1 : De Prapic au Lac des Rougnous en passant par le Col des Tourettes.

 

Prapic est un petit hameau typique du Champsaur et du Sud des Ecrins perché à 1556m d'altitude. Préservé de l'afflue des véhicules dans ses ruelles grâce à l'établissement d'un parking à l'entrée du village, il est le point de départ de nombreuses randonnées, que l'on soit en famille ou en route pour les hauts sommets.

On traverse donc ses ruelles pavées et on passe aux abords de son église construite dans les années 1860 pour partir vers le Sud, en direction du Saut du Laïre et du fond de la Vallée du Drac Noir.

 

Quelques minutes après être sorti du village de Prapic, on entre dans le Plateau de Charnière, zone pastorale et agricole aux alentours des 1600m d'altitude où il n'est pas rare de voire ovins et bovins cohabiter avec les marmottes des alpages.

 

 

Au bout du plateau, vers les 1800m d'altitude, on aperçoit le Saut du Laïre, une cascade sur le cours du Drac Noir. Ce dernier constitue la source du Drac, une rivière d'environ 130km jusqu'à sa confluence avec l'Isère au niveau de la ville de Grenoble.

L'intitulé Drac Noir provient des roches que cette eau traverse et qui conduisent à son assombrissement. Ces roches sont d'origine calcaire et donc plus sensibles à l'érosion. 

Au niveau de la rencontre des Vallées d'Orcières et du Champoléon, le Drac Noir se mélange au Drac Blanc, ses eaux provenant des vallons glaciaires présents en amont. Mais selon le Service d'administration national des données et référentiels sur l'eau (SANDRE), le Drac Noir constitue la source réelle du Drac.

 

On passe au-dessus de la cascade puis on poursuit jusqu'au fond du cirque. A ce niveau-là nous n'aurons d'autre choix que de bifurquer sur la gauche en direction du Col des Terres Blanches, les pentes Nord du Mourre Froid étant dépourvues de sentiers.

Après le Plateau de Charnière et le Saut du Laïre, le sentier finit par grimper plus sensiblement. Le mélézin s'évanouit totalement pour laisser place à un environnement alpestre surplombé d'une barre rocheuse. Le sentier zigzague dans l'alpage et passe près de la Cabane de la Barre puis part à l'assaut d'un nouveau ressaut.

 

Un nouveau cirque mi rocheux, mi herbeux nous fait face vers les 2300m d'altitude. Le Cirque des Sagnes est surplombé par la Barre des Rougnous et la Valaoute 2758m que l'on observe au centre de la photo. On accèdera au plateau présent en amont par la gauche et l'épaule herbeuse pour franchir la Barre des Rougnous.

 

 

 

A 2400m, le chemin se sépare en deux : l'un part vers le Col des Tourettes, l'autre vers le Col des Terres Blanches. On suit la première option pour gravir le Col des Tourettes que l'on aperçoit sur la gauche de la photo ci-dessus. A droite, le Mourre Froid 2993m domine les environs.

Au fur et à mesure de notre progression, les torrents rapetissent et l'eau se fait de plus en plus rare. Mais cela n'empêche pas les alpages d'être bien verts et tapis de fleurs à l'instar de ces Asters des Alpes.

Sur le Plateau des Rougnous se cache le lac éponyme. Espérons qu'il soit bien rempli tout de même. Mais avant de le découvrir, on part gravir le Col des Tourettes en suivant le sentier balisé. On partira ensuite à vue vers le lac et la Pointe des Rougnous 2749m que l'on devine à gauche.

 

Le Col des Tourettes 2606m est facilement reconnaissable avec ses deux éperons rocheux. Il permet de basculer de la Vallée du Drac Noir à la Vallée du Rabioux. La Crête de la Dent, sur la droite du col, peut permettre l'ascension du Mourre Froid mais il s'agit d'un itinéraire hors sentier.

De l'autre côté du Col des Tourettes, on aperçoit l'extrémité méridionale du Massif des Ecrins (de gauche à droite) : Tête de Soleil Boeuf, Tête de l'Hivernet, Tête du Tissap, Pic de Pied Brun, Pointe de Serre et Mourre Froid. Au fond de vallée on chute sur l'Embrunais et la Durance pour remonter sur le Massif du Parpaillon.

 

Côté Vallée du Drac Noir, on observe la longue arête du Tuba, la Pointe des Rougnous, le Roc Blanc et la Valaoute. Même depuis le Col des Tourettes, le Lac des Rougnous est imperceptible au milieu de l'alpage.

 

Pointe de Serre, Mourre Froid, Crête de la Dent, Pointe de la Diablée, Col de Reyna, Pointe de Reyna et Garabrut.

 

On contourne les deux éperons rocheux pour nous rendre sous la Valaoute. De là, on piquera dans le pierrier puis l'alpage pour partir à la recherche du Lac des Rougnous afin d'y établir le bivouac du soir.

 

Même s'il n'est pas rempli à bloc, le Lac des Rougnous 2526m est bel et bien présent. Alors que la moitié de sa rive est bordée par un pierrier, l'autre bord est assez plat et herbeux. 

C'est un magnifique coin bivouac d'autant que la vue est dégagée vers l'Ouest sur le chaînon allant du Mourre Froid au Garabrut.

Col des Tourettes, Crête de la Dent et Mourre Froid depuis les environs du Lac des Rougnous.

 

 

L'étape du jour ne fut pas particulièrement intense. Au départ de Prapic, il y a une dizaine de kilomètres à effectuer pour environ 1000m de dénivelés positifs. A la journée, il ne faut pas hésiter à gravir le Pointe des Rougnous 2749m que l'on observe à gauche de la photo. Chose que nous devrions réaliser aux premières heures de la seconde étape dans le Sud des Ecrins.

 

Jour 2 : Du Lac des Rougnous au Lac Palluel en passant par l'ascension de la Pointe des Rougnous, du Tuba et du Grand Pinier.

 

Grosse étape en perspective avec quelques sommets en ligne de mire, et pas des moindres puisque l'on devrait franchir la barre des 3000m d'altitude à deux reprises. On démonte le bivouac à l'aurore pour pleinement profiter d'une journée ensoleillée entre crêtes et sommets. Le premier intermédiaire correspond à la Pointe des Rougnous s'érigeant 200 mètres au-dessus du lac éponyme. Reste à voir si depuis le sommet, une transition vers le Col des Terres Blanches est envisageable ou s'il faudra nécessairement rebrousser chemin.

Lever de soleil sur le Mourre Froid, la Pointe de Reyna et le Garabrut.

 

Pour gravir la Pointe des Rougnous, aucune difficulté n'est présente durant l'ascension. Il suffit de garder le cap sur le sommet depuis le lac, puis quelques mètres avant d'atteindre la cime, on prend pied sur l'arête Sud pour gagner le cairn sommital.

 

Une fois sur l'arête, des cimes proches de la frontière franco-italienne deviennent visibles : Mont Viso, Pic des Houerts, Mortice, Aiguille du Chambeyron, Brec de Chambeyron.

 

Depuis la Pointe des Rougnous 2749m, alors que les sommets sont largement baignés par le soleil, le Lac des Rougnous et son plateau devront encore patienter quelques instants dans l'ombre.

 

Vers le Nord, le Tuba 3008m s'impose dans le paysage. A gauche on observe tout de même le Vieux Chaillol 3163m et le Dévoluy. A droite, les Crêtes de Dormillouse laissent quand même le Pelvoux apparaitre légèrement.

 

 

 

 

L'arête séparant la Pointe des Rougnous du Roc Blanc semble praticable. On alternera les passages à droite et à gauche de l'arête notamment sur la première partie entre le sommet et un petit collet herbeux surplombant le Lac du Distroit où cette dernière est plus effilée. 

Sur la suite, on évoluera entre chaos de blocs et petites dépressions, le tout accompagnés par les nombreux chamois qui paissent tranquillement sur les versants ombragés et frais.

On ne prendra pas la peine de partir à l'assaut du Roc Blanc 2897m mais on se dirigera à niveau vers le Col des Terres Blanches, point de départ pour gravir un autre grand sommet des environs.

Sur les flancs du Roc Blanc, on domine légèrement le Col des Terres Blanches 2721m. D'ailleurs à la frontière entre l'ombre et la lumière au centre de photo on devine la bulle de gypse blanche ayant donné le nom au col. Au-dessus, la montagne pyramidale correspond au Petit Pinier 3100m encadré par le Grand Pinier 3117m à droite et le Tuba 3008m à gauche.

 

Col des Terres Blanches 2721m.

 

Au lieu de directement piquer vers la Vallée de Freissinières et de poursuivre le tour du Grand Pinier. On se décide à rester à haute altitude en partant gravir le Tuba 3008m. Bien qu'il atteigne une altitude significative, l'accès depuis le Col des Terres Blanches est simple. Il suffit de suivre la large arête passant par les Lauzes Rousses pour rejoindre, à sa terminaison, le sommet du Tuba. Il n'y a aucune difficulté et la vue est imprenable de bout en bout. 

A noter que l'aller-retour entre le Col des Terre Blanches et le Tuba rajoute presque 7km à l'étape du jour.

 

Le sommet du Tuba correspond au dernier dôme rocheux avant le Col du Fond de la Cabane et le Petit Pinier.

 

L'ascension se fait au milieu d'un environnement aride et lunaire. Au fur et à mesure, les géants du Nord du Massif des Ecrins se font une place dans le paysage tels que le Sirac ou les Rouies.

 

La plupart des topos d'accès à la cime du Tuba ne passent pas par le Col des Terres Blanches. Depuis Prapic on peut accéder à la crête depuis le Vallon Cros et sa cabane. Depuis Dormillouse, il est possible d'atteindre le sommet via la Grande Cabane de Faravel et le Col du Fond de la Cabane. Tout ça pour dire que mise à part sa face Nord, le Tuba est une montagne accessible depuis ses différents versants. Pourtant, malgré l'accessibilité, le Tuba reste un sommet très peu emprunté, surement le résultat d'une montagne totalement à l'écart des sentiers balisés et ce sur de longues distances. Vous avez plus de chances d'effectuer cette ascension accompagnés des chamois du coin qu'avec d'autres bipèdes.

 

Depuis le sommet du Tuba 3008m (de gauche à droite) : Vieux Chaillol, Pic de Parières, Olan, Pointe des Estaris, Sirac, Rouies, Bans, Ailefroide, Barre des Ecrins, Coup du Sabre, Pic Sans Nom, Pelvoux, Grand Pinier, Crête de Dormillouse, Petit Pinier.

 

L'originalité du nom de cette montagne n'a aucun rapport direct avec l'eau mais plutôt avec la météo. ''Tuba'' est un terme occitan signifiant ''fumée''. Ce nom fait référence aux nuages venant de l'Ouest pour les habitants de la Vallée de Freissinières, le flux d'Ouest apportant généralement le mauvais temps sur la région.

 

Au Sud, le paysage est encore plus vaste au-delà de l'enchainement d'arêtes que nous venons d'effectuer. Sur la gauche on observe la dernière trinité des Ecrins dépassant les 3000m d'altitude : la Tête de Vautisse 3156m, le Pic de Rochelaire 3108m et la Tête de Couleau 3080m. Sur la droite, le Mourre Froid 2993m est toujours présent. Puis derrière les Ecrins on devine le Massif d'Escreins suivi du Chambeyron avec son Brec puis du Parpaillon, du Mercantour Nord, du Pelat, des Trois-Évêchés et même les Préalpes de Digne avec les Monges.

 

En pivotant un peu plus vers le Gapençais, on ajoute la Pointe de la Diablée, la Point de Reyna, le Garabrut, la Grande Autane, le Champsaur, le Mont Ventoux, le Dévoluy avec le Pic de Bure et le Grand Ferrand notamment ainsi que la station de ski d'Orcières-Merlette tout à droite.

 

Pile au centre de la photo, on devine au loin les Monges appartenant au Massif des Préalpes de Digne. Tout à gauche, il s'agit de la Tête de l'Estrop 2961m, point culminant du Massif des Trois-Évêchés.

 

Il ne nous reste plus qu'à rebrousser chemin jusqu'au Col des Terres Blanches pour poursuivre notre route autour du Grand Pinier et finalement basculer une bonne foi pour toute dans la Vallée de Freissinières.

 

Le Mourre Froid 2993m depuis les Lauzes Rousses.

Marguerites des Alpes.

 

De retour au Col des Terres Blanches, la végétation reprend des couleurs. Dans un premier temps on descend progressivement sur un plateau de plus en plus vert et de plus en plus humide situé entre la Barre Noire et les faces Nord du Pic de Rochelaire et de la Tête de Couleau.  L'objectif est d'atteindre le Lac de Fangeas, le point le plus bas de notre étape du jour, aux alentours des 1900m d'altitude.

 

Le Pic de Rochelaire 3108m.

Les Crêtes de Dormillouse et la Tête de Gramusat 2445m.

Le Grand Pinier 3117m.

 

La vue depuis cette plaine humide est splendide. On aperçoit particulièrement bien les sommets qui ferment la Vallée de Freissinières et on surplombe de plus de 400m le cirque formé par la Barre Noire. 

Ce n'est qu'à partir de 2400m que le sentier opère une descente un peu plus franche vers le Lac de Fangeas. On alterne petits ressauts rocheux et on passe aux abords de petites cascades dégringolant les escaliers de roche.

 

Au fond de la vallée on devine le hameau de Dormillouse.

Les alpages de la Grande Cabane de Faravel (visible au milieu du pâturage vert).

La faiblesse de Barre Noire qui nous permet de poursuivre la descension.

 

Depuis le lieu-dit des Balmettes, on a une vue d'ensemble du Cirque du Fond de la Cabane. A gauche, il s'agit de la Barre Noire que nous venons de surplomber. Tout au fond au centre, il s'agit de l'arête menant au Tuba.

 

Le Grand Pinier 3117m et la Grande Cabane de Faravel. Ce baraquement perché à 2200m d'altitude est réservé au berger en période d'estive mais est ouvert et bénéficie de quelques places de couchage le reste de l'année.

 

 

Le Lac du Fangeas 1990m n'a de lac que le nom. Pourtant, il est bel et bien indiqué par les cartes topographiques et la signalétique du terrain. Il s'agit en réalité d'un ancien lac voire d'un lac temporaire. Le Lac de Fangeas a été créé par une lave torrentielle dans les années 1960 ayant produit un barrage sur le torrent. On devine d'ailleurs l'emplacement de l'ancien barrage naturel et de la coulée sur la photo ci dessus. En 2023, le barrage a cédé et le lac s'est vidé, laissant derrière lui une zone comblée par les blocs et les sédiments. Qui c'est ? Peut-être qu'un jour le Lac de Fangeas se reconstituera.

 

 

A partir du lac, on se remet à grimper, en direction d'un autre lac bien existant cette fois-ci : le Lac Faravel. On monte progressivement à travers des fanges (ces zones humides qui ont donné le nom au lac que nous venons de croiser) pour arriver sur le plateau du Pont de Fer où coule l'émissaire du Lac Faravel.

 

Le Plateau du Pont de Fer avec le Pic de Rochelaire en toile de fond.

 

 

 

Le Lac Faravel 2386m forme un des deux principaux lacs comblant les vallons sous le Grand Pinier et ses sommets satellites. D'origine glaciaire, le Glacier de Faravel présent en face Nord du Petit Pinier n'est maintenant qu'un lointain souvenir. Le glacier étant remplacé par des névés plus ou moins durables en fonction des années et des chaleurs estivales. Et pour une fois les cartes IGN sont à jour puisqu'elles mentionnent ''Ancien Glacier de Faravel''.

A défaut d'apercevoir ce glacier, ce vallon est devenu une voie d'accès pour randonneurs aguerris vers le Petit Pinier 3100m.

 

Centaurées sur le sentier reliant le Lac Faravel et le Lac Palluel.

Le Lac Faravel et le Petit Pinier. On devine bien l'ancien emplacement du Glacier de Faravel.

 

La Vallée de Freissinières avec le Pic de Rochebrune 3320m et le Massif du Queyras en arrière-plan.

 

 

On ne fera qu'une rapide halte au Lac Faravel. On rejoint en quelques instants son jumeau un peu plus au Nord, le Lac Palluel 2472m. Ce dernier lac marque le démarrage de la voie d'ascension du Grand Pinier 3117m et constituera également notre coin bivouac du soir.

Initialement prévue le lendemain matin pour le lever du soleil, l'ascension du Grand Pinier sera réalisée ce jour. En effet, les prévisions météo indiquent un potentiel risque de nébulosité partielle sur les sommet au petit matin. On ne prendra donc pas le risque de gravir ce sommet dans le brouillard. On profite de ce temps radieux avec quelques cumulus orographiques largement au-delà des 3000m d'altitude pour partir à l'assaut du maître de Freissinières.

 

Face au lac, on suit dans un premier temps la sente qui le borde sur la droite avant qu'elle ne parte dans le vallon incliné en face. Elle grimpera ensuite radicalement vers les pentes herbeuses qui permettent de franchir la petite barre rocheuse pour rejoindre un collet. De là, il suffira de suivre la large arête, mais pas moins inclinée, du Grand Pinier jusqu'à sa cime. 650m de dénivelés positifs séparent le lac du sommet et malgré une distance assez courte et une inclinaison assez forte, il n'y a pas de passage technique.

 

Au collet séparant l'arête du Grand Pinier de la Tête du Serre Eyraut (point 2716m sur les cartes IGN), la sente est presque davantage visible qu'entre le lac et le collet. Un cheminement cairné aide à la progression entre les blocs et entre les différents ressauts rocheux. Même si vous perdez les cairns sur quelques mètres, l'ascension est évidente et l'arête ne présente pas de zones vertigineuses.

En regardant vers le Nord depuis l'arête du Grand Pinier, on domine sensiblement la Vallée de Chichin grimpant vers le Col de Freissinières. Il s'agit de notre itinéraire du lendemain.

 

Face à l'Ancien Glacier de Faravel et le Petit Pinier. A droite du sommet, on devine le dôme rocheux du Tuba où nous étions ce matin.

 

Vautisse, Rochelaire et Couleau depuis l'arête.

Le Sirac 3441m depuis les environs du sommet.

Le Lac Faravel finit par apparaitre une fois au Grand Pinier.

Encore une fois, le panorama depuis le sommet du Grand Pinier 3117m est exceptionnel, la nébulosité ne frôlant même pas les cimes d'Ailefroide ou du Pelvoux. On perçoit une bonne partie des géants des Ecrins (Sirac, Rouies, Bans, Ailefroide, Pic Sans Nom, Pelvoux, Agneaux notamment) ainsi que le Massif du Queyras avec notamment le Pic de Rochebrune qui fait écho au Pic Brun (l'autre nom du Grand Pinier) dans l'axe de la Vallée de Freissinières.

 

Plein Ouest, les nuages s'estompent au fur et à mesure de l'évanouissement des massifs alpins. Un temps magnifique baigne le Gapençais et ses sommets (Grande Autane, Pic de Bure, Vieux Chaillol en tête de liste). On aperçoit des sommets lointains comme le Mont Ventoux et même le Grand Veymont 2341m, point culminant du Vercors.

 

Plein Sud, on retrouve les sommets que nous côtoyons depuis maintenant deux jours : Vautisse, Rochelaire, Couleau, Roc Blanc, Hivernet, Petit Pinier, Tuba, Mourre Froid, Garabrut. Au-delà, le Mont Viso, le Chambeyron, l'Escreins, le Parpaillon et les Trois-Évêchés complètent l'arrière plan.

 

Zoom sur le coeur des Ecrins.

 

Zoom sur la trinité des 3000 du Sud des Ecrins. Tout à gauche, le Mont Viso 3841m semble pour une fois totalement dégagé de la nebbia.

 

 

Pour retrouver le Lac Palluel, nous n'avons pas le choix que de reprendre le même itinéraire. Quoiqu'un contournement du Point 2794 par la zone de Clamens doit être possible au vu du terrain peu abrupt pour ensuite retrouver le sentier joignant les Lacs Palluel et Faravel ou directement le Lac Palluel lui-même. A voir pour une prochaine ascension dans cette région.

 

On installe le bivouac légèrement à l'écart des rives du lac, sur le promontoire dominant la Vallée de Freissinières.  Non seulement pour la vue et pour la tranquillité mais également pour éviter de se faire défoncer par les nuées de moustiques qui patrouillent près du Lac Palluel.

 

Ayant effectué l'ascension du Grand Pinier, on peut se permettre de se lever au même moment que le soleil. La journée s'annonce tout de même longue pour retrouver Prapic, pile de l'autre côté du Grand Pinier. Encore une fois, la journée du lendemain s'annonce riche en paysages avec des vallées, un haut col et des lacs d'altitude.

 

Jour 3 : Du Lac Palluel à Prapic en passant par le Col de Freissinières.

 

 

 

 

Au petit matin, les météorologues avaient vu juste. Quelques bancs nuageux enquiquinent les cimes du Parc National des Ecrins. C'est même légèrement bouché sur le Massif du Queyras.

On patiente tout de même quelques instants après 6h. Le soleil devrait arriver à percer entre les différentes couches nuageuses et illuminer lac et sommet.

Le soleil frappe finalement le sommet, les pierriers et les rives du Lac Palluel. Un festival de couleurs lumineuses alliées au calme ambiant nous offre de magnifiques reflets à la surface du lac. On en profite quelques instants avant de débuter l'ultime étape de ce périple autour du Grand Pinier.

 

La suite de l'aventure consiste à descendre près de 700m jusqu'aux environs de Dormillouse pour se faufiler dans la Vallée de Chichin, voie d'accès au Col de Freissinières. Le sentier zigzague dans un premier temps sur les alpages verdoyants avant de s'immiscer dans le mélézin, forêt endémique de ce versant des Ecrins.

 

Vers 1800m, au niveau de la clairière de l'Ardouin, on stoppe notre descension. A partir de là, on grimpera lentement mais surement jusqu'au Col de Freissinières. Ce n'est pas moins de 10km et près de 1100m de dénivelés qui nous attendent avant de pouvoir basculer sur l'autre versant du col.

 

En bifurquant vers le col, on aperçoit furtivement quelques baraquements appartenant au village de Dormillouse. Ce hameau est l'un des treize de la vallée qui compose la commune de Freissinières. Perché entre 1700 et 1800m d'altitude, il est intégralement inclu dans la zone coeur du Parc National des Ecrins. Il s'agit d'une exception car c'est l'unique village habité à l'année du parc, peut-être grâce à son accès qui se fait à pied étant donné qu'aucune route, carrossable ou asphaltée, ne le dessert. Dormillouse peut servir de village-étape sur le Tour du Grand Pinier puisqu'un gîte est installé en son sein.

Les premiers kilomètres d'ascension du Col de Freissinières se déroulent globalement à niveau, à environ 1800m d'altitude. D'abord en sous bois puis dans des prairies entourées de torrents et de cascades. C'est seulement à partir du verrou de Chichin que l'on prend de l'altitude en grimpant vers les 2100m. A la suite de ce ressaut, l'ascension sera un peu plus progressive jusqu'à atteindre 2500m.

Depuis le Clot de Chichin, on retrouve le Grand Pinier tout à gauche. S'en suit le Col des Jalabres et la Montagne de Chapan 3033m. Sur ce pan de montagne, autrefois probablement occupé par des glaciers, aucun sentier n'accède aux cimes. Il existe cependant quelques topos d'accès au Grand Pinier en évoluant sur les crêtes.

 

Juste avant de passer la barre des 2300m, on passe près du Lac du Lauzeron, quasiment à sec en cette mi-juillet. Lorsque le lac est plein, ses environs sont un magnifique endroit pour y poser sa tente.

 

Après le Lac du Lauzeron, on commence tout juste à apercevoir le Col de Freissinières. Il reste encore tout de même 3km d'ascension et 400m de dénivelés. Une grande partie de cette dénivellation sera effectuée sur les derniers lacets, beaucoup plus radicaux que les trois-quarts de l'ascension du col.

 

Sur les derniers mètres, la faune locale nous accompagne : chamois, marmotte et même bouquetin près du col. 

 

Les imposantes roches striées de la Crête du Martinet et des Pointes de Rougnoux 3179m.

 

Le Grand Lac des Estaris 2555m avec au loin la Montagne de Céüse et le Mont Ventoux.

Grand Lac des Estaris et le Sommet de Prelles 2952m.

 

 

Au Col de Freissinières 2782m, on domine le Grand Lac des Estaris, dont les environs sont quelque peu défigurés par les remontées mécaniques de la station d'Orcières-Merlette. 

Ce col a plusieurs intitulés. Les cartes IGN mentionnent le Col de Freissinières ou le Col d'Orcières, mais il existe également la dénomination Col des Estaris, moins empruntée cependant. Ce col a souvent servi aux habitants de la Vallée de Freissinières pour basculer sur le Champsaur. 

Aujourd'hui, il est situé sur la délimitation du Parc National des Ecrins, son versant oriental appartient au coeur du parc contrairement à son versant occidental. Cependant, le fond de vallée où loge le Grand Lac des Estaris comprend une réserve : La Réserve Naturelle du Grand Lac des Estaris qui part des bordures Sud du lac, jusqu'à la ligne de crête de la Pointe des Estaris, à plus de 3000m d'altitude. Cette zone tampon entre le domaine skiable et le parc national est notamment là pour protéger certains terrains typiques de l'étage alpin et nival mais surtout près de 39 espèces animales référencées sur le secteur dont les deux tiers sont des oiseaux (Lagopèdes alpins, Vautours Fauves ou encore Aigles Royaux par exemple).

 

Ancien Refuge des Estaris et Pointe des Estaris 3086m.

 

Depuis le Col de Freissinières, on déboule sur le Grand Lac des Estaris puis on passe rapidement sur une petite partie du domaine skiable d'Orcières-Merlette jusqu'à atteinte les Lacs Jumeaux. De là, on part à niveau pour rejoindre le Lac des Pisses. Sur 3km, on évoluera en balcons au-dessus du Cirque du Torrent du Blaisil.

Lacs Jumeaux.

On reste globalement aux alentours des 2500m d'altitude. Lors du contournement de Roche Rousse, le sentier s'élève légèrement pour passer une ravine qui ne présente aucune difficulté sur terrain sec et par beau temps, sauf peut-être pour les personnes sensibles au vertige (photo de gauche).

On finit par retrouver un terrain moins vertigineux aux abords du Lac des Pisses 2500m. On retrouve également le Grand Pinier qui semble bien aplatit tout à droite de la photo. 

 

Le Lac des Pisses fait partie d'un programme de suivi scientifique appelé le Réseau Lacs Sentinelles. Ce programme a pour but premier d'étudier les écosystèmes de ces lacs, leurs développements, leurs fragilités pour ensuite mieux les protéger. Dans les Alpes françaises c'est pas moins de 24 lacs qui sont intégrés à ce programme, principalement présents dans la trilogie des parcs nationaux alpins (Vanoise, Ecrins, Mercantour), on trouve également certains lacs du Massif de Belledonne, du Mont Blanc ou des Aiguilles Rouges. Ainsi on peut citer le Lac de la Muzelle dans les Ecrins, le Lac du Cos dans Belledonne, le Lac de l'Arpont dans la Vanoise ou encore le Lac de Rabuons dans le Mercantour. Ce réseau n'est cependant pas cantonné aux Alpes puisque quelques lacs pyrénéens et corses sont également étudiés.

Une attention toute particulière est donc à mettre en oeuvre lors de son passage près d'un de ces lacs (signalétique mise en place) tel que le fait de ne pas se baigner dans leurs eaux, de ne pas toucher les équipements scientifiques si ces derniers venaient à être visibles ou encore d'éviter de poser sa tente trop près de leurs rives.

 

Tuba et Vallon de Chabrières.

Vallon du Blaisil et Grande Autane 2782m.

Au centre, on devine le Grand Pinier 3117m.

 

Depuis le Lac des Pisses, on chute sur Prapic par un très beau sentier cisaillant le vallon sur pratiquement soixante-dix lacets. Sur la première partie on a une vue dégagée sur la vallée et le cirque puis le mélézin prend le relai jusqu'au petit hameau, clôturant ainsi ce tour du Grand Pinier. 

Conquis par les paysages et le relief du Sud du Massif des Ecrins, la liste de 3000 ou de presque 3000 s'est considérablement accrue depuis le début de ce périple entre Drac et Durance : Vautisse, Mourre Froid, Rochelaire etc. Autant de cimes à découvrir peut-être lorsque l'automne aura pris ses quartiers dans la région, jaunissant les alpages et enflammant les mélézins, une autre période idéale pour flâner près des sommités du Sud de l'Arc Alpin.


ITINÉRAIRE DE LA RANDONNÉE : 

 

  • Départ/Arrivée : Parking de Prapic - km 0
  1. Prapic - km 0,4
  2. Chapelle de la Saulce - km 3,3
  3. Saut du Laïre - km 4,3
  4. Cabane de la Barre - km 6,4
  5. Bifurcation Cols des Terres Blanches/de Tourettes - km 7,9
  6. Col des Tourettes - km 9,5
  7. Lac des Rougnous (Bivouac 1) - km 10,7
  8. Pointe des Rougnous - km 11,7
  9. Col des Terres Blanches - km 13,3
  10. Le Tuba 3008m - km  16,5
  11. Lac de Fangeas - km 25,1
  12. Le Pont de Fer - km 26,7
  13. Lac Faravel - km 28,1
  14. Lac Palluel (Bivouac 2) - km 29,8
  15. Grand Pinier 3117m - km 31,8
  16. Collet de Serre Eyraut (début de l'arête) - km 32,8
  17. Cabanes de Palluel - km 35,3
  18. Bifurcation de l'Ardouin - km 37,7
  19. Cabane de Chichin - km 41,9
  20. Lac du Lauzeron - 42,7
  21. Col de Freissinières - km 46
  22. Grand Lac des Estaris - km 47
  23. Lacs Jumeaux - km 47,8
  24. Lac des Pisses - km 51,3
Tour et Ascension Du Grand Pinier Trace Gpx
Données géographiques – 710,6 KB

Ajouter un commentaire

Commentaires

Il n'y a pas encore de commentaire.